Louis Vuitton. 02.08.06
Chemin pavé d’un logo dans le dédale des langues étrangères. Ni sur les lèvres des clients ni sur les étiquettes ni sur les lèvres des vendeurs, presque pas de « french » dans la capitale. Nous sommes sur le pavé mouillé des Champs Elysées pourtant.
Un cercle et un losange. L’un dans l’autre, imbriqué. A son centre, convexe, du cuir chocolat. Plus haut. A peine à quelques roulements d’escalators, il se fait concave, orné d’un argent rutilant. Le luxe se conjugue selon les matières de l’opulence et de la finesse. Souligné à grand renfort de projecteurs, de recoins feutrés, de rappels de la marque en L&V entrelacés, de contradictions des textures. Mise en valeur par les oppositions. Tout brille. Même la sombre maroquinerie. Ce signe de reconnaissance fait pâlir les valises de cuir rouge vif. Piquent au cœur des ceintures dorées. Renient les étagères achalandées de matières semi précieuses, soie et autres peaux travaillées d'un ancestral savoir-faire. Foulards et porte-monnaie se languissent entre les doigts des japonaises.
Etage intermédiaire.
L'’éclat d’une demie coupole aveugle de son art résolument moderne. Kaléidoscope en lambeaux de verre. Se reflètent ces stalactites factices dans le miroir de la parois. Le tout sur un ton argenté. Perte de repères. Le regard ne sait plus où se figer. Comme il sautait d’un bijou à l’autre à l’étage du dessous sans pouvoir en fixer le détail des ciselures et l'orfeverie des manufactures de la maronquinerie.
Trou noir. Vers l’inconnu. 5 étages en 10 secondes.
Espace d’exposition Louis Vuitton.
Thématique l’Inde. Les murs tapissés de rose. Mille fioritures des maharajas contemporains. Déambuler entre les pigments ancestraux jetés ça et là. Sur une toile ou sur la peau. La pauvreté ajustée aux sourires des enfants des rues. Un parcours entre les teintes affirmées et les non couleurs. De l'excessif fortune au dépouillement d'un bus rouge qui rouille sur le brd d'une route.
Des photographies. Des installations; Un autre monde se dessine. Comme celui qui tranaparaît derrière des tentures fines, blanches. Les fenêtres sont quelques fois condamnées de ces voiles. Ils dévoilent plus qu'ils ne masquent.
Envie de franchir le pas. Passe muraille ou passe fenêtre. Paris tremble derrière la vitre.
Une fenêtre. Enfin ouverte. Des planches pour marches flottantes. Fraîchement maculées de pluie.
Clarté sur le monde. Les yeux en éveil. Un vent frais attisent les sensation. Là-haut.
360° presque parfait. Concorde. Grand Palais. Panthéon. Montparnasse. Invalides. Tour Eiffel. Arc de Triomphe. Sacré Cœur. Mise à genoux de la prétendue plus belle avenue française. Sanctification des cheminées et autres protubérances architecturales parsemées sur l’instable voûte azur du premier mardi d'août. Déclinaison de bleu, de gris, de noir. Noir de gris dont une seule goutte de pluie suffit à diluer l'opacité. Une infinité de nuances.
Un spectacle grandiose. Seule en haut de ces sept étages d'une autre capitale du luxe et de la renommée, de volupté et de fantasmes. De là-haut, le reste est tout petit. Tout en bas. Se pencher. Un peu trop. Et relever les yeux. La Tour Eiffel appelle. A l’ouest, gris. A l’est, bleu. Parsemés de prolixes et ambulants espaces ivoirins. Nuages de passage.
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Si j’étais riche.
Si j’étais riche, je rachèterais ces quelques mètres carrés d’un 7e étage parisien. 7, le chiffre de tous les possibles.
Sur ces cloisons immaculées, l’accrocherais mon plaisir quotidien. Du soir au matin.
Dans ce tendre parquet j’encrerais ma raison.
Dans les deux espaces noirs. Au nord et au sud. Je condamnerais les démons. Boîtes de Pandore aux serrures blindées.
Sur les lattes de bois clair je traînerai mon regard alangui face à ces splendeurs fuyantes et offertes à l’extase.
Sur cette terrasse, je rirais aux éclats de côtoyer tant de beauté en compagnie des amis chers. Paris. A nos pieds.