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(Tout) et n'importe quoi.
28 octobre 2006

Mister K.

077Elle a beaucoup marché. Comme souvent le samedi. Au milieu des gens qui n'ont le loisir de s'empiler les uns sur les autres qu'en fin de semaine. Elle se faufile dans la normalité. Dans la foule. Même si elle ne sait pas toujours poser son regard sur cette vie grouillante. Sans doute a-t-elle l'air hautaine. Du haut de ses bottes. Enroulée dans son châle noir. Les cils papillonnant sans cesse. Ne sachant se poser. Alors qu'elle n'est qu'une quémandeuse parmi d'autres. Et une rêveuse. Elle ne voulait pas râter le rendez-vous. Celui sous-entendu. Vaguement proposé. Fantasmé. En rien fixé. Alors elle est sortie. Dans Paris. A retrouvé ses mûrs familiers. Tant longés. Elle s'est dirigée droit devant. Jusqu'à la Bourse. Elle s'était un peu arrangée. Elle se répétait de ne pas y croire. De ne même pas le supposer. Le désirer. Que les chutes sont toujours plus dures ensuite.  Surtout ne pas le désirer ni l'espérer. Sans cesse à lui trouver d'excuse. De la logique pure et simple, en fait. Elle a défait les liens de ses utopies naissantes. Elle n'aurait même pas du y penser. Comment aurait-il pu être là? Il savait, oui. Le lieu. Le projet de ballade. Mais pas ses horaires. Pas plus que les chemins qu'elle emprunte habituellement. Les détours qu'elle aime faire entre les châtaigners de ce jardin auquel elle tient. Oui. Mais. Quand même. Elle se prend à espérer. Un grain de folie. Un souçon de hasard. Ou de chance. Ou de magie. Un beau mélange. Une pointe au moins. Pour contenter son côté fleur bleue. Son petit goût démodé pour que les premières avances soient masculines. Elle avait déjà avancé beaucoup de cartes. Tendu des mains. Déposé le programme de sa journée.
Elle est restée sur le seuil.
Elle a traversé des rayons entiers. Des parures à faire palir d'envie les moins coquettes des demoiselles qui déambulent dans les allées de la maison au double K. Ou dans d'autres travées de prêt à porté. Et elle a fuit. Ce ne serait pas raisonnable.  Enfin si, parce que la vie ce n'est pas être raisonnable. Ou pas toujours. Mais pas dans ce sens là, vers elle. Les magasins hors de prix, ce n'est pas de son rang. Seulement pour faire des cadeaux. De ce qui ne font pas honte. Pour les coups d'inconscience si doux quand ils pétillent dans les yeux d'autruis. Sans qu'il n'y ait de boules de Noël colorés dans les parrages pour vouloir faire naître ses quelques lueurs. Trop de monde ne tue pas toujours la solitude.
Elle a rejoint la surface.
Le samedi. Dans Paris. Elle a toujours mille choses à faire. Et tellement rien en fait. Seulement craquer devant les vitrines. A essayer des vestes sublimes dans les magasins des grands boulevards du centre parisien. Et les rendre aux vendeuses tout sourire, en prétendant que  "Non, ça n'allait pas". Et user ses semelles sur le bitume. A hésiter devant les murs de cartes postales. Elle doit lui écrire. Certes... Elle tourne en rond dans ses parcours préférés. S'échoue souvent en bord de Seine. Et regarde passer les gens sur le quai. Sur les bateaux-mouches. Amasse leurs joies manifestées. En fait des tas. Comme ceux de feuilles d'automne. Pour qu'elles la colorent. Toujours une chanson en boucle dans le creux du vague à l'âme. Une ritournelle qui la fait se balancer doucement au-dessus d'un cahier marron qu'elle rougit à tour de bras. De tout et rien. De tout et n'importe quoi. Le dos contre la pierre, elle dessine du bout de la pointe un instant volé à la beauté d'un ciel bleu. Traînées de pensées en réacteurs d'avions. Et soleil discret mais éclatant pour teinter le décor.
Elle est rentrée.
Elle serait bien restée là. A prendre du temps pour elle. A ne rien faire d'autre que de grapiller quelques pages de "Julien Parme". Elle lui accordé quelques sourires entre les lignes. Mais peut-être pas seule.
Elle a beaucoup marché.
Quand enfin, ses boucles indisciplinées ont déserté son cou sous un léger mouvement.
Quand enfin, une douce pression a enserré sa taille.
Quand enfin, sa main a accusé réception d'un petit poids chaud au creux de sa paume.
Il était là. Juste à temps. Pour déposer dans son cou un baiser. De ceux qui lui tirent toujours un sourire mi-gêne mi-plaisir. Une invitation. Il le sait. S'en amuse. C'est sa parcelle de peau à lui seul. Pour l'enlacer après une journée d'absence. Pour glisser sa main dans la sienne et les balancer au grès des mots échangés sur un pont.
Il était là. Ils étaient seuls. Ils étaient deux. Eux deux. Seuls à eux d'eux.

amelie02

Ce n'était qu'un courant d'air qui a soulevé la brousaille de ses cheveux.
Ce n'était que la pression du dernier cran de sa ceinture sur sa hanche droite.
Ce n'était que le poids de son sac à main et la chaleur fatice de la lanière dans sa paume.

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Commentaires
E
*pense a kafka* bande son pas véritablement appropriée.mais.l'espace d'un souffle. Jurer que.Il y a sans doute un inconnu qui croise ta route, toujours au même endroit les yeux rivés sur ta silhouette, seulement le ciel taccapare tant et si bien qu'il est semé en route pas ta déroute. Admirable détournement de mot. Pensais a toi, il y a quelques semaines. Mlle Nothomb a Lyon.
A
... et se sentir vivre à son tour...
A
C'est comme toujours. Démêler le vrai du faux. Et les secrets d'alcôve ne se réveleront que dans des murmures intentionels...<br /> Paris, ça fait rêver. C'est son influence, voilà tout. Il suffit de regarder les gens autour de soi... Observer les gens vivre...
E
Pendant qqs secondes de lecture, j'aurais cru que c'était vrai...<br /> Mais bientôt ces douces sensations partagées seront tiennes.....
F
Waw, c'est très beau. Je suis à mon tour soufflée.
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