La nuit d'une soirée.
Il me reste comme une mélancolie accrochée à la peau, à quelques notes et trois filets de voix d'un autre horizon. Là-bas, sous le béton et les colonnes de verre. Il me reste comme une larme sèche à l'œil. Comme une violente douceur qui touche son but autant qu'elle dépérit en route. Une langueur. Espoir et désespoir. Comme la toile opaque d'une nuit sans phare mais constellée. Et la notion du temps qui s'enfuit, emportant avec lui le passé qu'il ne cesse de rejouer et de détruire. De rappeler, au présent. Juste pour faire dire au moment qui passe à l'instant sur la peau et le cœur que plus rien ne serait jamais pareil. Que tout s'échappe, change et tombe des mains. Toujours autre, toujours sauvage et incertain. Sans lui permettre d'affirmer si cela sera pire ou meilleur, à l'avenir. Il me reste une berceuse dans un recoin de l'âme. Les notes agressives d'un rock déchaîné embrassant la folk des cabarets américains, celles suspendus en pizzicato délicat sur fond de complaintes des anges et la voix éraillée de ceux qui ne savent plus où regarder. Un frisson. Quelques sourires. Quelques notes. Quelques photos.
Et je tremble.
Je suis dur
Je suis tendre
Et j'ai perdu mon temps
A rêver sans dormir
A dormir en marchant
Partout où j'ai passé
J'ai trouvé mon absence
Je ne suis nulle part
Excepté le néant
Mais je porte caché au plus haut des entrailles
A la place ou la foudre a frappé trop souvent
Un coeur ou chaque mot a laissé son entaille
Et d'où ma vie s'égoutte au moindre mouvement
Pierre Réverdy.
Tard dans la vie, in La Liberté des mers.