Elephant.
Lentement. Comme en ballade de santé. Seulement un peu plus arnaché qu'à l'accoutumé. Armé, en fait. Ce n'est qu'un détail. Le fusil d'assaut au poing. Juste un poids au bout du bras. Léger. Dans les couloirs désertés. Sans courir. Sans se presser ni s'annoncer. Sans même une goutte de sueur qui perlerait sur la tempe droite. Le regard autain. Et les mots assassins. Comme les tirs à tout va. Ils avancent. Se rejoingnent. Font une petite pause dans la cafétarai ensanglantée. Un détour par la chambres froides, les toilettes des filles ou la bibliothèque. Ils ne compte pas les points. Mais n'oublient pas de bien nettoyer. Et de vérifier. Que le premier niveau soit propre pour passer au suivant...
Pas à pas, se faufiler derrière eux. Déambulations.Vus de dos. La plupart du temps. Se risquer au face à face. Sous tous les angles. A travers les yeux des protagonistes. Voir de près ces petits riens d'adolescents. Ceux qui sèchent les cours pour s'embrasser plus loin. Ceux qui arrivent en retard. Se moquent ou accusent les risées. Vomissent dans les toilettes ou développent des photos en labo ou visitent le campus de fond en comble. Ceux qui fomentent des plans macabres. Nouvelle version de jeux vidéos grandeur nature. Ils ignorent qu'ils seront traqués. Proies. Là. Juste à l'angle du couloir. Derrière les armoires de leurs casiers en acier.
Une note dissonnante dans le vacarme de la jeunesse amércaine en perdition : Beethoven. Au piano. Sonate au Clair de Lune. Sous les doigts du juvénile assassin, les touches. Noires et blanches.
Et les cris qui retentissent après le sifflement des balles.
Quelque chose de dérangeant. Dans ce film. Il n'en est pas un. Ou, les faits qui l'ont insipré ne sont pas de la fiction. Les deux. Match nul.
Et douze victimes.
Un drame.
Le parti pris scénographique n''est pas dérangeant. Course poursuite en catimini. Des célébrités malgré elles. Dont elles n'ont pas conscience. N'en aurait jamais vent. Bien que les médias aient relayés la tragédie à coup de reportages. Traquées comme elles le seront quelques mètres de bombines plus loin.Quelques pressions de gachettes plus tard. Etranges sensations qui se bousculent devant ces images.
Une musique enivrante. Classique. Pour des tragédies contemporaines. Et les attiudes calmes. Posées. Souriantes des deux assassins en herbe. Déconcertantes. En cela perturbantes. Mille interrogations tentent de démêler la romance filmographique des faits réels. Et ce trouble du spectateur. Du voyeur ? Impossible de ne pas se demander si tout s'est réellement déroulé ainsi. Qui a renseigné le réalisateur? Les acteurs ? Comment a été reconstitué les faits ? Qu'est-ce qui tient du scénario, du vécu, des déductions policières ?! Une mémoire sur grand écran. Macabre poésie du quotdien. Du terriblement possible. Puisque folie humaine.
Un film singulier et puissant.
Un film de Gus Van Sant.
Palme d'Or & Prix de la mise en scène.
Cannes 2003.